Bouchra Jarrar et Lanvin : l'amour dure un an
Quinze mois après son arrivée à la tête des collections femme, Bouchra Jarrar quitte la maison Lanvin, dans un contexte tendu depuis plus de cinq ans.
Première parution Grazia
Fallait-il y voir des indices semés façon Petit Poucet sur Instagram ? Une manière d'anticiper élégamment son départ ? Un an après sa nomination à la tête des collections femme de Lanvin, en mars 2016, la créatrice Bouchra Jarrar a mis fin à sa collaboration avec l'illustre maison, le 6 juillet dernier. Sa décision. Ces petits cailloux ? En dernier post, une carte de visite, adressée à Madame Jeanne Lanvin, "affectueusement" : "Une page se tourne, une autre va s'ouvrir."
La veille, l'ange du Petit Palais, légendé "L 'envol - la grâce", jour de l'annonce de son départ. Les semaines précédentes : une photo de la danseuse étoile Marie-Agnès Gillot, déjà sous-titrée "L'envol", des images de fittings des collections, une pluie de hashtags #douceur, #onlygoodvibes, #Ilovemyjob. Depuis le début, tout a toujours souri à celle dont le prénom en arabe signifie "bonne nouvelle".
Une mode entre raffinement et technicité
Une jolie carrière, commencée dans l'ombre des grands noms, Jean Paul Gaultier, Christian Lacroix et Nicolas Ghesquière, époque Balenciaga. Fin juin, elle recevait encore des mains de l'ancienne ministre de la Culture Audrey Azoulay la médaille d'officier de l'ordre des Arts et des Lettres. Chouchoute de la presse française dès le lancement de la première collection de sa maison éponyme, défilant au calendrier de la couture comme membre permanent, dès 2013.
Sur ce compte Instagram, la personnalité de Bouchra exhale. On y hume de la poésie, sensualité des inspirations venues de ciels rosés, odeurs de fleurs, orchidées, lotus, roses. Une pureté de lignes saluée par le plus grand nombre, y compris par l'éminente Suzy Menkes qui, dans le New York Times, la voyait dès ses débuts incarner "le nouvel esprit calme de la mode". Une mode entre raffinement et technicité, dans laquelle les femmes Lanvin s'imaginaient en perfecto, robes du soir toutes en transparence, vestes de smoking courtes sur pantalons fluides, avec des touches du bleu vif maison.
Pour se consacrer 100 % à la griffe, elle avait fermé la sienne. Alors comme dans tous les divorces, on se dit que les choses ne sont pas si simples. Les ventes étaient en baisse depuis 2012, le plan de relance se faisait attendre depuis le départ brutal du créateur Alber Elbaz en 2015, en désaccord avec l'actionnaire majoritaire, Madame Shaw-Lan Wang. En toute neutralité, on se dit que quinze mois, c'est peu, pour redresser une maison ancestrale. Une recapitalisation de plusieurs millions a été annoncée dans la presse.
Bouchra, elle, revole de ses propres ailes.
Par Céline Cabourg